J’étais perplexe. Je me disais « Attendons pour voir. Tu te feras ta propre opinion ». Mais sans cacher ma crainte bien présente.
Et puis mon heure est arrivée. C’était mon tour. Voulu, pour sûr. Attendu, sans aucun doute. Mais toujours avec cette sensation de ne pas savoir où aller. Cette peur de l’inconnu. Cette impression de marcher sur des œufs, avec, au fond de moi, un pressentiment qui me disait « on t’a menti ».
Je tombais, la tête la première, dans l’expérience de la grossesse !
Replaçons le contexte. La grossesse. Plutôt, la Grossesse. Avec un grand « G ». Elle la mérite bien cette majuscule. Surtout au vu des dires des anciennes participantes. Que du bonheur. Sentir une vie à l’intérieur de soi. Se sentir femme. Ressentir ce petit être bouger. Et que dire de la femme en elle-même ? Elle rayonne ! Elle resplendit ! Ses cheveux sont soyeux. Ses ongles beaux et sains. Sa peau est douce. Ce sont les hormones. Ces mêmes hormones d’ailleurs qui la rendent euphorique. Elle plane. Elle a des petites crises de larmes, c’est vrai. Mais qui ne durent pas. Et seulement pour des choses sans importance : elle n’arrive pas à ouvrir le bocal de cornichons, elle pleure encore plus devant les téléfilms ringards, elle trouve tellement beau un oiseau qui prend son envol… Et puis il y a les envies. Envie de fraises. C’est la plus répandue. Envie de salé si c’est un garçon. Envie de sucré si c’est une fille. Bref, la Grossesse c’est vraiment merveilleux. Que de bons moments en perspective. Avec quelques petites contrariétés, c’est vrai. Mais elles sont vite oubliées quand on est face à tellement de bonheur…
Très bien. Je ne veux pas faire la rabat-joie. Je ne veux pas être celle qui casse toutes vos illusions. Je ne voudrai pas vous révéler que le père-noël n’existe pas et que le monde des Bisounours n’est présent que dans votre tête mais… AU SCANDALE ! Ils ne nous ont pas tout dit ! Ils ont omis d’autres vérités. Celles plus haut sont vraies. Mais ce n’est pas celles que l’on retient !
Allez, j’ose tomber le masque idéal de cette si belle période qu’est la gestation.
Déjà, le mot en lui-même aurait dû nous mettre la puce à l’oreille. Grossesse. Grosse-Esse. « Esse » a plusieurs significations. Vient du latin « Es », soit le verbe être. C’est aussi le crochet qu’utilisent les bouchers pour suspendre la viande dans les chambres froides. C’est aussi une cheville qu’on met au bout de l’essieu d’une voiture pour éviter que la roue ne sorte.
Quoiqu’il en soit vous l’aurez compris… La Grossesse c’est une période pendant laquelle on est un gros morceau de viande, avec l’impression d’avoir des membres en moins et surtout, surtout, cette impression constante d’être bloquée et de ne pas pouvoir agir comme d’habitude.
On aurait dû nous prévenir que sentir bébé bouger, oui, mais c’est surtout ce moment où ton ventre se durcit, l’impression qu’il va exploser puis Bam ! Un coin se lève ! Mon Dieu, j’ai fait un Alien ! Ton ventre se met à faire des vagues. Pour celles qui n’ont pas de chance, il craquèle. Toute ta vie ta chère moitié retrouvera le chemin de cette période adorée. Tu as faim. Tu ouvres le frigo. Saumon, pas le droit. Mayonnaise, pas le droit. Gâteaux, ok mais pas trop. Jambon, ça dépend lequel. Nutella, ça te donne des nausées. Carottes, faut les laver pendant 3h30. Fromage, faut déchiffrer les étiquettes. Tant pis, tu manges la fin de la galette des rois. Horreur. 1h après tu as des remontées acides. Ça te brûle. Tu as l’impression que tu vas vomir, mais rien. Tu aimerais vomir. Au moins, après, ça passe. Tu t’allonges. C’est pire. Tu t’assoies. Tu n’y arrives pas. Une, deux, tu balances ta jambe, et, avec l’élan, tu te redresses. Tu as pris trop d’élan. Tu vacilles. Pas le sol, pas le sol. C’est pire !
On aurait dû nous prévenir que notre système interne serait tout déréglé. Que soit tu es totalement constipée au point de ne plus passer 15 minutes aux toilettes mais bien 30 minutes à chaque fois. Que tu as peur de rester avec les yeux bridés à vie tellement tu tentes. Que chaque seconde tu te dis « et si bébé sortait en même temps ? ». Alors tu jongles. Poussée. Aspiration. Poussée. Aspiration. Ha ! Ça, tu le travailles ton périnée ! Ou alors que ton corps aimerait jouer la symphonie de Beethoven à coups de gaz naturels. Tu n’as jamais eu la sensation d’avoir autant d’air dans ton corps. Par le haut, par le bas, rien n’est laissé-pour-compte. Bébé pousse, pousse, pousse, les intestins et autres organes, et, crois-moi, tu ne l’oublies pas !
On aurait dû nous prévenir que notre parfum adoré deviendrait notre pire ennemi. C’est quoi cette odeur de pourri ? Ha, ce n’est que le parfum à 80€ que tu as offert à Monsieur pour son anniversaire. Chéri, à partir de maintenant, c’est odeur naturelle, et rien d’autre. Oui d’accord, sauf que… Ton odorat est surdéveloppé ! Alors la facture d’eau va grimper. Car ta moitié doit briller, du soir au matin. Sinon, tu vomis. Entre mon repas de midi sur toi, et une 3ème douche, tu as choisi non ? Oui, d’accord, sauf que… Tu as utilisé du gel douche à la vanille là ? Non parce que je vais me sentir mal. Je défaille. Ha non, tu ne dors pas là. Ok, 4ème douche… Zen, ça ne dure que 9 mois. Presque tous les parfums deviennent des odeurs putrides. Ne parlons pas des odeurs de nourriture, de cigarette ou encore des couches des aînés…
On aurait dû nous prévenir qu’un grain de sable dans notre chaussure allait nous faire partir en vrille. Que le passant qu’on laisse traverser au passage piéton et qui ne nous remercie pas devient la pire monstruosité sur terre. Tellement, qu’on a envie de descendre de la voiture pour lui retourner trois paires de claques et lui apprendre la politesse. On ne supporte plus notre petit de 2 ans qui refuse de se laisser moucher. Alors on lui crie dessus. Puis on pleure. Car on regrette de lui avoir crié dessus. Puis on rabâche « je suis désolée » à son mari. Désolée que tu m’aies vue comme ça. On a trop honte. On voudrait se cacher. Alors on pleure. Parce qu’on ne sait faire que ça en fin de compte. Et cette satanée serviette qui ne se plie pas comme je voudrai qu’elle se plie. On a envie de la déchiqueter. On a envie de lui faire regretter.
On aurait finalement dû nous prévenir que quand on se regarderait dans le miroir, on se dirait juste « vivement la fin ». On prend des kilos, c’est sûr. Mais pas que. Le visage est bouffi. Les jambes enflent. On se déplace comme le bonhomme Michelin. Il faut faire attention aux escaliers. La peau est plus sensible. Le nombril devient le bouton « on » d’une machine à hurler. On ne peut plus se mettre sur le ventre. Sur le côté aussi c’est difficile. Alors on se couche pour être vite au lendemain. Journée qui nous amènera un peu plus vers la libération. Mais toujours et encore ces remontées acides qui te démontent le gosier. Et quand elles finissent par te laisser tranquille, c’est bébé qui fait la java. Tous les jours. Entre 4h et 7h. Ton ventre devient le terrain de jeu d’une mini crotte qui a décidé que non, tu ne dormirais pas. En tout cas, pas quand tu le décides.
Allez, au bout il y a un petit être. C’est grâce à ça qu’on tient. A ce moment qu’on imagine tellement de fois, celui où on le prend dans ses bras pour la première fois. Par contre, mini nous, je te préviens. Tu as intérêt à être belle et gentille. Sinon, c’est brocolis et épinards à tous les repas ! A VIE !