« Autre ».
Cet « autre », commence par être nous même. Bébé, on se voit dans le miroir. On pense que c’est quelqu’un d’autre. Un étranger. Puis, on prend conscience que cet « autre », cette image, n’est autre que notre reflet.
On tente de s’apprivoiser. On essaye de se comprendre. On apprend à se connaître. Tour à tour, on se déteste. Puis on se vénère.
Vient l’adolescence, et on voudrait s’approprier un autre moi. Une autre voix. Notre voie, on la cherche. On essaie de déstabiliser cet « autre » qu’on a mis quelques années à amadouer. On voudrait le durcir. On voudrait un « autre » moins lisse, moins souple.
Puis on s’assagit. Quelques uns. Cet « autre », remanié ou pas, on s’y habitue. On s’en imprègne. On ne cherche plus un « autre » soi, mais on cherche « l’autre ». Celui avec qui « moi + l’autre = nous ». Celui pour qui « l’autre » prend tout son sens. Celui pour qui on voudrait devenir tout simplement TOUT.
Un « autre » qui nous comprend. Un « autre » qui nous sourit. Un « autre » qui soit présent.
Cet « autre » étranger et passé, devenu moi, se donne entièrement à « l’autre ». « L’autre » qui deviendra « son autre ». Sa raison de se lever le matin. Sa raison de se dépasser. Sa raison de vivre.
Puis l’on comprend que pour que « l’autre » ressente l’envie de devenir « notre autre », il faut commencer par s’aimer soi-même. Il faut commencer par faire les choses pour soi. Pour sa propre estime. Pour son propre bien-être. Il peut alors nous respecter. Nous admirer. Et c’est à partir de là que le « moi », que « l’autre », que le « nous » sont complètement confondus.
« L’autre » n’existe plus. Nous sommes un « nous ». Nous pensons à deux. Nous vivons à deux. Nous vivons l’un pour l’autre, l’un avec l’autre, l’un contre l’autre. « L’autre » est un bout de soi.
« Autre », « un autre », « l’autre », « son autre » puis « les autres ».
Le mot « autre » glisse et évolue au fil de notre vie, avec le sens que chacun veut bien lui accorder.
« Je est un autre »*
* A. Rimbaud.